24 déc. 2012

massu


– je pense que je vais arrêter
– t’es fatigué ?
– bah, disons que je vais arrêter. Enfin, je crois…
– hé! la croyance…
– ok! Je pense que je vais arrêter
– t’es fatigué ?
– arrête! veux-tu!
– ça va!… c’était bien les pousses de fougère
– c’était y’a longtemps
– cuites dans l’eau 20 minutes…
– 30!
– 30 minutes, petite huile d’olive et…
– ouais mais j’aurais pu penser à l’huile de noisette, et plutôt que du sel un pilé d’ail séché ou d’anchois séché
– t’as des anchois séchés !?
– non. Je pourrais, lentement sur des claies ou pendus par la queue dans une pièce aérée. P’t’êt’ ça existe déjà l’anchois séché. Faudrait. Tu vois, si ça existe pas, ça me désole
– tu exagères
– non. Maintenant y’a plus personne pour envisager l’envie de faire un truc pareil, dans le cadre d’une coutume, d’un us ethno-partagé
– y’a toi. Y’a des gens comme la boulangerie à Montreuil, là, je sais plus le nom
– alors excuse-moi
– ça va, pas besoin de s’excuser. Le cœur de cheval, tu fais quoi ? «J’avais sur une grosse langue de ventricule hachurée au couteau appliqué, gros sel, poivre noir, coriandre, laurier, cayenne et grains de fenouil pour sur la face intacte à l’étouffée dans une sauteuse 20 mn pendant que – faire la sauce – réduisaient au sirop les 50 cl de vin rouge sur fondu d’échalotes, ail, thym, rebouillus très doux 8/10 minutes dans 20 cl de fond de veau, chinois puis en tournant la casserole 50g de beurre et une c.s. de salmiakki finlandais, fils de poireaux vapeur et strates des cristaux en camaïeu de bruns» ?
– on pourrait l’écrire autrement
– ho la la, t’es vraiment triste aujourd’hui!
– excuse-moi
– triste et chiant
– ok. Peut-être un pain de viande au cœur de cheval, envisagé comme une promenade
– ça part mal
– je veux dire comme une conquête, une guerre, une invasion, une rapine des nations, un blitzkrieg sans hoquet ; des provinces aménagées entre elles depuis des siècles en socle de tout sont passées à la moulinette et serviront de limon à un nouvel homme dans un nouveau monde. Elles se nomment : cœur de cheval, oignons, beurre, sauge, chapelure, épinards, fanes, branche du céleri, coriandre, baies rouges, poivre, romarin, armagnac, sel, anchois et veau. Les proportions sont laissées à chacune des armées incursives qui resserrant leur étau cuisent th. 7 le tout enveloppé-serré dans du papier d’aluminium.
– 20 mn ?
– hmm, un bon 40
– tu m’aimes ?
– disons que je te coupe en deux

<pas de visuel>

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